Lundi, je suis allé porter mon tapuscrit à mon amie d’enfance, Séverine. Je suis arrivé chez elle avec mon ouvrage, comme on accompagne son enfant pour son premier jour d’école. Une fois qu’il entre en classe, sa vie finit de nous appartenir. Jusque là, on l’avait toujours à nos côtés, partageant toutes ses découvertes, chacune de ses premières fois, … et puis, soudain, il prend un petit peu d’indépendance. Il continue d’être, d’exister, de grandir, de vivre de nouvelles choses « sans nous ». Cette sensation est étrange. On désire l’envol de nos enfants et, pourtant, dès leurs premiers battements d’ailes, on ressent un vide immense. Mélange de fierté, d’angoisse et de mélancolie. Bien sûr, je ne fais pas de comparaison entre un livre et un enfant, c’est juste une mise en parallèle pour expliquer ce que j’ai ressenti en m’imaginant Séverine avec mon livre. Elle le lit et je ne suis pas là pour voir ses réactions, pour commenter chaque passage, pour dévoiler les secrets que j’ai cachés derrière tel ou tel détail. Je ne sais pas à quel moment elle prend « Votre dernier mot », ni ce qu’elle pense quand elle le repose. Mon livre est chez Mme Séverine et, quand je le verrai à 16h, je lui demanderai ce qu’il a fait durant cette première journée d’école mais, comme tous les enfants, il me répondra : « rien ». Premier verrou posé sur la porte de son intimité.
Heureusement, j’ai une amie formidable et elle m’a écrit ses premières impressions. Ca m’a d’ailleurs donné une idée pour ce site … je vais ouvrir une section « vos mots » où je publierai les réactions qui m’auront touché, interpellé, amusé, surpris, … Parce que seules vos critiques comptent. Je ne serai jamais un écrivain dont on parlera dans la presse mais ça m’est égal car c’est votre ressenti qui m’importe. Un « génial » de ma femme, un « j’adore » d’une amie chère auront toujours plus de valeur que n’importe quelle critique, même dithyrambique, qu’un professionnel pourrait me consacrer.
Depuis lundi, mon livre m’appartient moins. Il commence à prendre son envol et j’en suis profondément ému. Un rêve, puis un projet, un écrit ensuite et, depuis cette semaine, un presque-livre qui a quitté ma maison. Prochaine étape : le livre imprimé et relié. Elle est vraiment belle cette aventure …
